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    LA PAGE DE FRANCIS !!! 

Parce que son récit intéresse plusieurs aspects du site (Premier contact & Législation) et que tant de passion - et de pugnacité - lui valent aussi "La moto du mois" de Novembre, Francis a droit à une page rien que pour lui ! Avoir un Dnepr c'est rien, mais mériter de s'en servir, c'est vraiment toute une histoire...

Voici donc 11 chapitres sur l'homologation d'un MT11, formidable leçon d'équanimité... et d'humour !

 

RTI pour un Side-Car DNIEPR MT11

 

1 POURQUOI UN SIDE-CAR RUSSE ?

C'est tout simple. Au début des années 1970 j'ai effectué plusieurs déplacements professionnels de longue durée en Russie principalement à Syzran charmante bourgade sur les bords de la Volga. Un jour j'ai vu un point noir qui grossissait sur la Volga en approchant de la rive. C'était un side-car. Il venait d'une île. C'était l'hiver, la Volga était gelée sur presque un mètre d'épaisseur et sur 17 Km de large. J'ai toujours gardé les images de ce spectacle.

2 LE DECLIC

En lisant un journal moto j'ai remarqué une annonce avec photo d'un side-car russe à prix bas. L'affaire s'est organisée rapidement par téléphone avec le vendeur et le dimanche matin suivant, je me suis retrouvé dans une cour de ferme près de La Rochelle. Cinq motos toutes peu reluisantes. Un 750 et quatre 650 plus "récentes". Quatre noires une verte. J'aime le vert. J'ai pris la MT11 verte. Le choix était fait. Contrôle des numéros de cadre et de moteur par rapport aux papiers ukrainiens, document douanier et certificat de vente français. Avec cela il n'y aura aucun problème d'immatriculation m'affirme le vendeur.

L'affaire était faite, nous étions 02 mars 2003, les ennuis pouvaient commencer.

3 LES PRELIMINAIRES

Avant tout démontage j'ai pris la précaution de faire une centaine de photos de la moto et du panier sous tous les angles. Elles m'ont été bien utiles par la suite.

Puis il faut préparer un coin pour stocker les pièces démontées et un établi dédié à cette opération qui promettait d'être longue et salissante.

Stockage des gros morceaux sous bâche dans un coin de jardin peu visible depuis la maison…

4 JE ME RASSURE

Pour me rassurer avant le démontage j'ai décidé de faire craquer le moteur.

Pour cela il faut mettre de l'huile dans les carters car le vendeur m'a bien précisé quand je lui ai demandé par téléphone si l'on pouvait l'essayer que par raison de sécurité pour le transport toutes les huiles et l'essence ont été vidangées et la batterie supprimée. C'est le bon sens. Quand on voit les machines on ne pose pas la question de savoir si l'on peut les démarrer. Ce serait même ridicule de l'imaginer.

Donc, je retire la jauge du moteur pour faire le plein d'huile et surprise, il y a une pâte noire sur la tige de la jauge idem pour la boîte et le pont. Par les trous de vidange rien ne coule franchement. Je verse du gasoil dans les carters pour diluer et à force de « touiller » et de secouer, le jus noir sort de mieux en mieux. Rinçage au gasoil pur avec quelques coups de kick en espérant que la pompe à huile n'est pas trop bouchée.

Remplissage d'huile pour le moteur, mise en place d'une nourrice d'essence extérieure et d'une grosse batterie avec de gros câbles et la séance kick commence. Avec la lumière du garage j'ai eu du mal à voir les étincelles des bougies mais dans le noir j'ai vu qu'elles existaient. Après ? bien c'est comme d'habitude : on noie le moteur, on « kicke », on regarde l'état des bougies, sèches ou humides, on « kicke » à nouveau, on passe au "Start pilot" on « kicke », bougies, ..etc, etc …

En plus ce n'est pas très pratique quand il n'y a pas de béquille et que la moto est en équilibre sur des cales en bois, que les câbles d'accélérateurs sont cassés, plus de starter sur les carburateurs et que l'essence coule partout des carburateurs. C'est le grand bonheur quand elle finit par tousser et démarrer.

Le bruit est magnifique, les voyants de pression d'huile et de charge se sont éteints. Je débraye, je passe la première vitesse et la roue arrière tourne. Seconde, troisième, quatrième, toutes les vitesses passent. J'ai l'impression que la mécanique n'est pas trop pourrie et me voilà rassuré. Je vais pouvoir prendre mon temps pour la remise en état. Je ne savais pas que deux ans et demi plus tard j'y serais encore.

 

5 LE DEMONTAGE

Rien de bien compliqué et en une journée tout est tombé et rangé. Bien repérer tout les éléments quand il peut y avoir confusion et surtout les fils de ce qui reste du faisceau électrique. Faire attention de ne pas se couper avec les tôles qui sont rouillées à coeur.

Petite découverte, l'ancien propriétaire devait être charpentier car le support de batterie tenait avec de gros clous passés dans le cadre. Sur le coup j'ai été un peu moqueur et par la suite j'ai ressoudé le support. J'ai compris bien plus tard, lorsque j'ai remonté le moteur, que si j'avais conservé la fixation par clous, il m'aurait suffit de les retirer pour sortir le support batterie et ainsi remettre le bloc moteur/boîte ou d'autres fois la boîte seule sans faire de gymnastique.

6 L'AMICALE

C'est maintenant que je découvre l'Amicale Dniepr et Oural de France ainsi que la FFVE. Un peu tard semble-t-il. Surprise, Pierre un Amicaliste habite à 20 Km de chez moi. Je prends contact et il va venir me voir avec son MT16 venant d'Allemagne et fraîchement immatriculé en France dans mon département.

Je présente mon acquisition à Pierre. La vue du tas de ferraille rouillé le laisse rêveur. Il prend quelques photos, me propose toute l'aide dont j'aurai sûrement besoin et m'invite à faire un tour avec son MT16. Cerise sur le gâteau après quelques Km il s'arrête et me laisse le guidon. En plus il est courageux le Pierre car c'est la première fois que je monte dans un side et par-dessus le marché, il me le fait piloter.

La conclusion de la journée est que le side-car, ça me plaît bien et que le MT11 n'étant pas très différent du MT16 il n'y a aucune raison pour que je n'aie pas rapidement la carte grise pour ma machine.

7 LA REMISE EN ETAT ET LE REMONTAGE

La philosophie que je prends est la suivante. Je refais la machine correctement au plus bas prix pour la présenter à la DRIRE. Au cas où je n'aurais pas le carton ce ne serait qu’un demi mal. Après, je ferai plus fiable quitte à reprendre des travaux et acheter du matériel.

Bon, il faut maintenant se mettre au travail.

Pour la remise en état j'ai utilisé depuis les recettes de grands-mères jusqu'aux résines chargées et produits issues de la chimie moderne.

Voilà en vrac ce qui a été fait :

• Dérouillage et protection de tout ce qui est ferraille à la brosse métallique pour retirer les morceaux puis à l'acide chlorhydrique dilué avec arrêt de la réaction à la lessive de soude suivi d'un rinçage. Pour les petites pièces ça va bien, pour les garde-boue ça se corse et pour le panier on peut parler de galère. Ca pique les yeux, le nez. Gants, lunettes et protections obligatoires.

• Peinture antirouille verte au pistolet basse pression et filets crème du même type passé à l'aérographe pour la carrosserie et antirouille noir brillant pour le cadre. Deux couches pour tout le monde. Le pistolet basse pression permet de travailler dans le garage sans avoir à tout sortir avec de simples bâches qui pendent du plafond pour délimiter la zone de travail. C'est un bon outil qui fait très peu de brouillard contrairement aux pistolets traditionnels.

 

• Le circuit électrique à été refait en partie. J'ai rajouté un fusible général et modifié le circuit pour séparer la partie allumage du reste. Le circuit phare est aussi séparé de celui des feux de position. J'ai utilisé du fil de grosse section pour le circuit d'allumage. Là, il ne faut pas mégoter. Tout le circuit du side a été fait puisqu'il n'y avait plus rien. Pour raccorder le side à la moto j'ai utilisé des prises de circuit électrique de machine à laver le linge récupérées la veille du jour bénit du ramassage des encombrants. La séparation du circuit d'allumage m'a permis une fois de rentrer à la maison certes sans aucun éclairage ni voyant ni signalisation mais par mes propres moyens. Il faisait jour. Donc le travail a servi à quelque chose.

• Changement des ampoules, bougies et fil de bougie.

• Changement de tous les joints de fourche et d'amortisseurs.

• Changement des câbles de frein, de carburateurs et d'embrayage.

• Regarnissage des mâchoires de frein avec du tendre.

• Changement des pneus.

• Côté moteur, démontage de tout les carters, cylindre, piston. Changement des segments et d'une soupape qui était fendue. La soupape neuve a été trouvée dans une caisse de vieux « riblons » dans l'arrière boutique d'un usineur. Réusinage des portées, rodage, découpage de nouveaux joints dans des chemises cartonnées, nettoyage au gasoil sous pression (là aussi on rigole)…. Que du classique en somme !

• Carburateurs démontés, nettoyés, bouchage correct et définitif des circuits de starter, joints dans des chemises cartonnées…. Encore que du classique en somme.

• Comme il n'y a plus de filetage sur les sorties d'échappements des culasses, les joints ont été refaits avec de la filasse de plombier et de la glaise. Une fois cuit (il suffit que le moteur démarre) c'est bien dur mais cassant. Comme il faut démonter souvent, on se lasse vite alors plus tard j'ai ouvert les écrous à ailettes avec un trait de scie et je les resserre avec un « Serflex ». Ca tient super et c'est facilement démontable. A noter.

• Evidement, durite et filtre à essence ont été changés.

• Changement de selle. Je n'avais jamais vu une selle double aussi rafistolée avec de la ficelle comme matériau de base.

• Remise en état des portées des butées à billes de direction côté cadre. Je pense que j'aurai toujours des soucis de ce côté là. Changement des butées à billes.

J'ai acheté tout le matériel d'origine Dniepr par Internet en Allemagne. Je n'ai que de vagues restants scolaires d'Allemand. Ce n'est donc pas facile de demander les prix exacts, de mettre ses Euros dans une enveloppe avec la commande, d'attendre et de voir arriver le paquet 15 jours plus tard. Ca a toujours bien marché. Par contre comme le vendeur ne rend pas la monnaie, je lui ai fais comprendre de faire l'appoint avec de petites pièces complémentaires de son choix. Je suis maintenant à la tête d'un joli jeu de rondelles.

Bien, nous sommes en juin 2003. Le moteur à bien redémarré, donc vite un petit essai dans la rue pour vérifier que tout va bien, et hop il n'y a plus qu'a passer à la DRIRE pour les formalités et ainsi profiter des beaux jours pour les balades…

8 LA DRIRE - PREMIERE TENTATIVE

C'est la première fois que je vais à la DRIRE. Je cherche un peu mon chemin. Aujourd'hui, j'y vais les yeux fermés.

J'y suis allé un peu décontracté avec un petit dossier et une copie du dossier de Pierre. Je suis reçu dans un bureau par un technicien. Je lui explique que je voudrai une RTI pour ma MT11qui est à peu de chose près la même machine que la MT16. "Ok il ne devrait pas y avoir de problème" me répond-il, "on va remplir les documents nécessaires et vous reviendrez la semaine prochaine voir mon supérieur pour les signatures".

Tout le monde en fait un fromage mais ce n'est vraiment pas compliqué pour avoir une RTI.

La semaine suivante changement de décor avec le chef. Les deux machines sont différentes. La MT11 n'a jamais été homologuée en France et il faut donc faire les tests obligatoires de la machine en vue d'une homologation. Cela veut dire passage par l'UTAC ! J'essaye de le faire basculer, avec plus ou moins de bonne foi et pour conclure, il me dit qu'il va voir ce qu'il peu faire avec la Direction des Contrôles technique qui est à Paris. Pas terrible cette matinée, mais tout n'est pas perdu.

15 jours plus tard une lettre de la DRIRE arrive et m'annonce qu'exceptionnellement des essais réduits seront demandés à savoir :

• Mesure puissance moteur au banc

• Freinage en charge sur piste

• Pollution

• Bruit

• Parasites

• Eclairage

• Pesée du véhicule

Sympa ils ont supprimé le Crash Test !

L'UTAC à Monthléry me fait un devis. Bilan 1500 Euros. Je décline, je vais monter un dossier pour la FFVE.

J'envoie à la FFVE un beau dossier argumenté et avec des photos couleur. Deux semaines se passent et mon beau dossier me revient. Irrecevable. Normal.

Que faire ? Maintenant il va falloir cogiter sévère.

9 ENTRE DEUX DRIRE

Je me suis mis à faire de petits tours dans les chemins et petites routes du village. Juste pour voir évidemment. Je n'allais pas bien loin de toute façon car les pannes étaient fréquentes. Juste par précaution j'avais mis la plaque d'un autre side-car russe que j'ai avec des papiers en règles en espérant faire illusion en cas de contrôle.

A cette période je reçois un coup de téléphone d'Alex, une personne qui a aussi fait l'acquisition d'une MT11 à La Rochelle à la même période que moi. Il est en train de le refaire et a la ferme intention d'avoir sa carte grise. Sa philosophie est différente de la mienne. Il refait tout, complètement nickel chrome et la présente. Il habite au sud de la Loire. C'est loin. On reste en contact par téléphone.

Par chance, j'ai un collègue de travail qui est marié avec une Russe, Nina. Elle me traduit les grandes lignes de la carte grise et du PV de vente devant notaire ukrainien. Ca donne une idée de la vie de la moto. Il y a eu plusieurs propriétaires et intermédiaires avant son achat par mon vendeur.

Mes essais sont de plus en plus longs et je vais de plus en plus loin pour rendre visite aux amis.

Les problèmes sont fréquents. Ca chauffe par-ci, ça fuit par-là, y a plus d'allumage…..Allô, viens me chercher avec la barre d'attelage pour me remorquer…Ne jamais oublier son téléphone portable. Ces petits tours justes pour voir et fiabiliser la machine ont duré presque un an. Un jour Alex me téléphone pour m'annoncer qu'il a sa Carte Grise pour son MT11 !!!! Champagne pour lui.

Je décide de préparer une nouvelle attaque de la DRIRE.

Nous sommes en août 2004 et je reçois une copie du dossier DRIRE d'Alex avec sa documentation, la RTI et la CG.

Il a fait traduire les documents ukrainiens par un traducteur officiel. Je me renseigne dans ma région. La même traduction avec tampon officiel est quatre fois plus cher que sans tampon. Ramené au prix de l'heure, le coup de tampon doit être l'équivalent du budget de l'état français. Je sollicite de nouveau Nina pour une traduction complète. Elle fait appel par Internet à une copine Ukrainienne pour valider et traduire correctement certaines expressions différentes du Russe.

Le résultat est clair, compréhensible. Rien à voir avec la traduction officielle d'Alex ou l'on n'y comprend pas grand chose. Je fais une belle mise en page avec en-tête, adresse, téléphone, e-mail, nom et prénom et je signe. Il n'y aura pas de tampon officiel mais je suis sûr de la qualité de la traduction. Ca ne coûte rien et je tente ma chance comme cela.

Il ne me reste plus qu'à monter un nouveau dossier pour la DRIRE et avec tout ces documents. Ils vont céder.

10 LA DRIRE - DEUXIEME TENTATIVE

Mon nouveau dossier est épais. Page de garde, introduction, photos couleur en cours de restauration et du résultat final, document technique en Français, documents des douanes et acte de vente français, CG et documents d'achat ukrainiens avec traduction, photo de la plaque de firme, formulaires DRIRE, dossiers d'Alex et de Pierre plus copie d'une CG de MT11 homologuée en Allemagne. Je joue la transparence.

Attention, c'est maintenant que ça se complique.

Première visite à la DRIRE le 12 octobre 2004. Chance, le responsable moto est là. Je lui explique pourquoi je fais une nouvelle démarche. Ca commence mal. Il me déclare que la RTI d'Alex ne peut pas faire jurisprudence et même il critique sévèrement le travail de son collègue. J'argumente, j'insiste pour qu'il regarde le dossier en entier. Il trouve que le dossier est complet et qu'il montre bien ma motivation pour cette RTI. Ce détail est important. Rendez-vous est pris pour la semaine suivante même lieu même heure.

Le 19 octobre. Le responsable voit la possibilité pour lui de demander des dérogations. Ce n'est pas lui qui les accorde.

"Si on se lance dans la démarche dit-il ce sera fait sérieusement".

Je réponds que je ne veux pas rouler sur une machine non conforme et dangereuse et que je tiens à ce qu'elle soit contrôlée par des personnes compétentes. La seule chose que je ne peux pas me permettre c'est de passer par l'UTAC. Il a vu ma motivation et lui aussi est intéressé par ce cas d'école. Ca finira forcément par aboutir.

OK, on se lance. On remplit le document d'enregistrement avec un numéro d'ordre. Je vais m'en souvenir longtemps de ce numéro car je l'ai souvent donné par téléphone ou par écrit.

Je vais donc être convoqué pour le contrôle. La semaine suivante je reçois une lettre de convocation pour le 8 novembre. Panique. Ca me laisse deux semaines pour préparer la machine. Il faut qu'elle soit parfaite et aux normes. J'appelle Pierre.

J'explique, il est tout de suite d'accord pour que je cannibalise sa MT16 juste pour 2 à 3 semaines. Ce sera fait dès le samedi suivant. J'arrive avec ma liste de pièces à ramener, mes cales en bois et mes outils. On retire les 3 roues chromées toutes neuves avec de beaux pneus, les cabochons des feux, le phare (la coupelle du mien est toute rouillée) et les échappements.

Les soirées des deux semaines à venir vont être longues et mes ongles vont être en deuil pour un bon moment. En plus de cela il me faut trouver une remorque.

Le prénom inscrit sur la convocation n'est pas le mien. Je le signale par écrit à la DRIRE. Le jour de présenter la machine arrive. Il pleut des cordes. Je ne suis jamais sorti avec la Dniepr par temps humide. Je crains le pire. Dans la file d'attente je vais mettre le contact toutes les 5 minutes pour vérifier le circuit électrique. Pas trop longtemps pour ne pas tirer sur la batterie. Je ne la fais pas démarrer car je sais bien la faire démarrer à froid. A chaud c'est plus difficile.

Le responsable vient me voir et m'explique qu'il va faire passer les 4 Mercedes avant moi car "…ce ne sera pas long et cela nous laissera le restant de l'après midi pour regarder l'attelage sous toutes les coutures". Gloups ! Avec un large sourire je lui dis que ça me paraît un bon plan et que je suis d'accord.

Lors du contrôle tout à marché. Le phare, les feux, les clignotants récupérés sur ma Triumph et elle a démarré du premier coup à la surprise de l'attroupement de contrôleurs venu voir le phénomène. Tout le monde a trouvé le bruit bien sympathique. Séance photos pour le dossier de la DRIRE avec beaucoup de détails. Je passe sur les mille questions et comparaisons avec le dossier technique que j'avais fourni.

Les conclusions sont notées sur un document. Les actions suivantes sont à faire :

- Demande de dérogation pour la transmission vers le side.

- Il faut monter un frein sur le panier. Pas de demande de dérogation possible. Facile !

- Remettre en état le système de blocage du guidon. C'est la loi.

- Faire un système de frein de parking. Il y en a un dans la documentation technique.

- Mettre un catadioptre à l'arrière de la moto car le E2 n'est pas très visible (c'est le seul cabochon que je n'ai pas changé)

- Mettre un rétroviseur avec un E2. Celui que j'ai mis a bien des numéros mais pas les bons.

- Revoir la fixation de la batterie.

- Demander une attestation d'indice de charge, de développement de roulement et d'indice de vitesse pour les 4x19 montés à la place de 3,75x19 de la notice.

Il y aura donc un nouveau contrôle avec un essai d'accélération, de freinage et de frein de parking sur la piste des camions pour valider le tout.

Echange de point de vue sur la méthode de faire le blocage de la direction et le frein de parking et on se quitte en se disant "A bientôt". C'est bon ça continue. Le contrôle a duré 1h55.

Allô Pierre, dis donc, est-ce que je pourrai garder tes pièces encore un peu ? Oui pas de problème. Alors GO !

Quelques e-mail dans mon Allemand à moi, une enveloppe avec des Euros et un colis avec tout le système de freinage du panier arrive à la maison. Flasque, mâchoires, câble de commande et une rondelle. Au boulot. La routine quoi.

J'ai soudé une patte pour accrocher le point fixe du frein sur le bras oscillant. Mise en place du flasque et des mâchoires. C'est de travers, ça coince et ça va pas à fond. Quelque entretoises et rondelles plus tard ça va bien. Le câble et c'est fini. Il n'y a plus qu'a régler et essayer dans la rue. Pas trop vite des fois que ça se passe mal. Il y a des voitures en stationnement. L'affaire est vite écrite mais 5 soirées sont nécessaires à ce montage.

Pour le blocage de la direction j'ai fais une goupille qui rentre bien dans le canon du cadre et dans le trou de la colonne de direction. En perçant le bout extérieur du canon je peux mettre un petit cadenas. La fonction est remplie et c'est simple.

Le frein de parking est encore plus simple. Une simple cale biseautée qui vient coincer le levier de commande du frein arrière. La cale a été peinte en noir pour que le bois ne se remarque pas trop. Pour freiner il suffit d'appuyer sur la pédale et de mettre la cale entre le levier et le cadre. En plus ça marche.

Les catadioptres se trouvent en super marché au rayon cyclo.

J'ai demandé, au patron du magasin où ont été achetés les pneus, l'attestation nécessaire. Je n'ai rien pu en tirer alors j'ai cherché et trouvé l'importateur. Un coup de téléphone et une charmante dame comprend mon problème. Le lendemain j'ai l'attestation dans la boîte à lettres avec en plus la mention "Les pneus en 3.75x19 ne se fabriquent plus".

Elle est bien cette dame.

Le rétroviseur viendra d'une casse.

Déjà le 10 décembre et je n'arrive plus à avoir de contact avec le responsable ni par téléphone ni par fax.

Un lundi soir je donne un coup de téléphone et le correspondant attendu répond. Il est surpris que tout soit prêt. Les rendez-vous qu'il me propose sont trop loin en janvier. Si l'on veut solder le dossier en 2004 les tests doivent être faits demain matin (mardi) à 8 heures il n'y a pas d'autre solution. "Serez-vous prêt ?" Pas de problème j'y serai. Dure soirée en perspective il faut tout vérifier et charger.

Le lendemain vers 7h30 je suis à la DRIRE. Il y a déjà plusieurs camions. Le responsable arrive à 8h et vient me voir directement. Il m'explique par oû passer et me garer quand il va ouvrir les portes. Il s'approche des portes, les camions démarrent. STOP il les arrête tous et me fait signe de passer devant la meute. Ouah. Je me gare, décharge la machine. On me demande de la mettre sur une fosse prévue pour les camions. C'est juste pour ne pas tomber dedans. Contrôle du montage du frein et des gadgets demandés. Nouvelle séance photos.

Maintenant en piste avant les camions. Je « kicke » et elle part du premier coup après les préliminaires obligatoires. Je la chauffe bien car je vais devoir rouler à 50 Km/h avec l'inspecteur dans le panier. Je n'ai jamais été si vite et pire je n'ai jamais essayé les freins depuis la modification du panier. Hommes et machine sont prêts ou font semblant.

Il y a du brouillard. L'inspecteur me dit "C'est une ligne droite, on fait un aller-retour. Donc à 50 Km/h et à mon signal freinage maximum". C'est parti. J'accélère 35 puis 40. Plus vite me crie l'inspecteur. Encore un petit effort et nous voilà à 45. C'est long. L'inspecteur attend quoi pour me dire de freiner ? Et moi je n'en mène pas large car dans le brouillard je ne vois pas où est le bout de la ligne droite. La piste est mouillée évidemment.

"Frein !" crie l'inspecteur. J'écrase progressivement poignée et pédale de frein. On finit par s'arrêter.

Je regarde mon passager-inspecteur, il a le sourire. C'est bon ça. Il déclare "Ca ne freine pas fort mais ça freine droit". En fait il attendait un repère au sol et ainsi connaître la distance de freinage. Le bout de la piste est juste là alors je fais demi-tour. Rassuré par ma première prestation, j'accélère fort sur le retour et au top, grand coup de frein !

Le passager à toujours le sourire et déclare "C'est bon" Ouf, et il ajoute "on va tester le frein de parking". Là je suis sûr de mon coup car dans le garage je n'arrive pas à pousser l'attelage quand le frein est mis.

Programme "Vous montez sur la bute en herbe qu'il y a là et vous vous arrêtez à mi-pente vous mettez le frein de parking et avec moi dans le panier ça doit tenir. C'est une pente normalisée".

Bigre … celle-la je ne l'avais pas vu venir. Cale en bois peint dans la poche, j'attaque la montée. Impeccable la machine a une bonne motricité. J'envisage même un instant d'aller un peu plus haut car la pente s'adoucit un peu. "STOP !". Bon, c'est vous qui commandez alors on reste là. Je freine fort du pied et engage la cale. Je lâche progressivement les freins. L'inspecteur est dans le panier. Ca dérive un peu. Je recommence. Je freine très fort du pied. Je cale et relâche. C'est limite et les freins grognent. Elle risque de glisser d'un poil. Je lève le pied. L'inspecteur me dit de lever les mains. Sans réfléchir et dans un même élan je lève les deux mains bien hautes en faisant les marionnettes et je plante ma botte gauche en terre. L'inspecteur regarde mes mains, mon pied droit, compte jusqu'à 10 et déclare "C'est bon" Manoeuvre inverse. Ouf, ça a été chaud sur ce coup là.

Retour à la remorque et direction le bureau ou il me donne les informations pour faire graver et fixer la nouvelle plaque constructeur. Il me demande encore un petit calcul pour justifier un peu mieux la circonférence des pneus et des photos de l'intérieur du frein ou l'on voit les mâchoires. Si j'arrive à lui faire parvenir tout ça dans les 3 jours, le dossier peut-être bouclé avant la fin de l'année. Je n'y crois pas et j'avais raison.

Je lui fais parvenir tout ce qu'il m'a demandé dans les 3 jours. Maintenant c'est Noël alors pause en attendant la convocation à la préfecture pour faire la carte grise.

Fin janvier rien n'est arrivé. Je recommence les séances téléphone sans obtenir d'info intéressante.

Mon interlocuteur habituel est parti pour 3 mois en stage. Je me déplace et l'on me certifie que tout va bien. Bon je croise les doigts car j'ai rendu les pièces de la moto à Pierre. Je décide que tout se passera bien et je commande un phare, cabochons de feu et différentes pièces en Allemagne. Je passe les détails des mails, des Euros et du colis.

Je téléphone une à deux fois par semaine à la DRIRE sans grand résultat.

Fin février c'est moi qui reçois un coup de fil de la DRIRE. Une bonne nouvelle sans doute. Non, la personne qui accorde les dérogations à la Division des Contrôles Technique de Paris veut des informations complémentaires sur les fixations du side et de la transmission qui n'existe pas ! Pas de problèmes, j'explique sans broncher. Deux semaines plus tard de nouveaux un coup de téléphone de la DRIRE. C'est pour connaître le non de l'ancien propriétaire Russe. Je le donne calmement sans omettre de préciser que c'est en toutes lettres et en Français dans le dossier.

Mars arrive et j'ai de plus en plus de mal à avoir un correspondant mais maintenant la standardiste reconnaît ma voix. Un jour j'apprends que le dossier est de retour à la DRIRE et la personne qui me l'annonce précise presque à voix basse, je site : "Il n'y avait pas besoin de dérogation pour la transmission car cela n'affecte pas la réglementation. C'est donc un modèle identique au modèle homologué, modifiè au titre de la transmission arrière". Je pose la question naïve suivante "A quoi ont servit toutes ces démarches et le temps passé" La réponse est claire "Rien". Gasp ! Calme. Il faut positiver et on dira que ce n'est pas grave. Je vais avoir la RTI et la CG dans la semaine. Erreur une nouvelle fois.

Il faut d'abord recevoir la facture et la payer. Comme par hasard sur la facture le prénom n'est toujours pas le bon. Mon courrier d'octobre n'a pas été pris en compte. Téléphone + fax + e-mail et au besoin j'y vais. Je n'imagine pas voir arriver une RTI avec un prénom faux. Cette moto est à moi sans parler des problèmes pour avoir la carte grise. Je téléphone encore le lendemain ou on me confirme que le nécessaire à été fait pour le prénom mais du coup il faut faire signer la nouvelle RTI par le directeur qui ne sera présent que vendredi. Naïvement je dis "Ca partira donc vendredi soir et je pourrai aller à la préfecture lundi" "Non monsieur car le prochain passage du vaguemestre est mardi". Je suis sans voix. Heureusement.

Les jours passent tranquillement et toujours pas de dossier à la préfecture. Le 15 mars j'ai l'information comme quoi le dossier est arrivé à la préfecture. Une heure après je fais la queue. C'est mon tour. Ca part mal car le dossier est un peu compliqué mais ça s'arrange rapidement et je retourne m'asseoir en attendant que Le Document soit imprimé et je me mets à lire la RTI. HORREUR ! C'est marqué SOLO et non side-car. En un éclair je suis au guichet pour arrêter la validation avant que la préposée ne presse la touche "ENTER". Il était temps. On téléphone à la DRIRE. Il faut renvoyer le dossier. Au revoir la préfecture et à bientôt.

Quelques jours plus tard je téléphone à la DRIRE. Le dossier est bien revenu de la préfecture mais celui de la DRIRE est archivé et il faut le ressortir. Là, pour archiver ça a été du rapide. Je téléphone aussi souvent que je peux et le 28 mars le dossier est de nouveau à la préfecture.

Je fonce à la préfecture. Tout est bon. J'ai ma carte grise.

Le champagne est pour moi ce coup là.

Résumé pour ceux qui on zappé des lignes (et je les comprends) :

- 2 ans et un mois pour la CG

- Des heures de cogitation (incalculable car ça fonctionne aussi la nuit en dormant)

- Le même nombre d'heures de travail

- 5 visites au bureau de la DRIRE

- 2 présentations de la machine

- Pour la DRIRE : 3 fax, 7 mails et 34 coups de téléphone, pour le reste je n'ai pas compté

- La révision de l'Allemand écrit

- Une très grande satisfaction d'être arrivé au bout et de pouvoir être en panne au bord de la route en toute légalité.

Les bienfaits de la DRIRE : Leurs demandes m'ont obligé à faire du travail propre et à améliorer la machine. C'est une bonne chose de freiner droit et de savoir que la moto est correcte.

11 ET MAINTENANT...

Comme prévu je roule de plus en plus et les plus gros soucis sont venus de l'allumage. J'ai installé une assistance électronique des vis platinées ainsi qu'une bobine de 2CV. Depuis je ne suis jamais resté planté.

Quelques soucis aussi de roues qui chauffent mais maintenant j'arrive à aligner plusieurs dizaines de kilomètres d'affilée sans redouter la panne même si je sais qu'elle arrivera un jour. Maintenant je m'occupe des détails.

C'est agréable d'ouvrir l'essence, de brancher la batterie, de démarrer et partir sans préparatifs ni caisse à outils pour une petite balade le dimanche. J'évite de rouler en semaine car je sais qu'à la vitesse ou je vais je suis une gène pour les autres usagers de la route et avoir un poids lourd qui colle derrière n'a rien d'agréable.

Ce fut long et compliqué mais je ne le regrette pas.

Une dernière chose.

Félicitation aux lecteurs pour leur patience pour la lecture de ces 11 chapitres. C'est assez long. Heureusement pour nous tous que la machine s'appelle MT11 et non MT16. Ca suffit comme ça.

 

PS :

- Ce récit est mon histoire et peut donner des idées pour faire des démarches mais le lecteur ne doit pas imaginer que toutes les demandes à la DRIRE aboutissent. Il y a beaucoup de paramètres à prendre en compte et les DRIRE réagissent différemment d'une région à l'autre.

- Tout ceci n'est qu'un résumé. Beaucoup de détails n'ont pas été mentionnés. Pour des questions ou des explications complémentaires vous pouvez me contacter par e-mail a gafauval@yahoo.fr Attention je suis en retraite. Mon emploi du temps est donc très chargé alors de nouveau patience pour les réponses mais je sais que vous en avez.

Francis. Le 11/10/2005

 

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